Les liens vers la chaîne :
Peertube : https://tube.kher.nl/video-channels/mangayoh_channel/videos
Youtube : https://www.youtube.com/channel/UCImVxjIl3rIEoQIqeDIvKfA/videos

La vidéo sur Peertube et Youtube :

Salut, et bienvenue dans cette vidéo où on va parler d’aphrodisme.
Pour aujourd’hui, je serai accompagné de Cécilia, qui est psychologue spécialisée dans les TCA et qui a étudié les questions d’image du corps, d’insatisfaction corporelle, etc.

L’aphrodisme c’est la discrimination sur les critères de beauté, à la fois la beauté en elle-même, mais aussi le code vestimentaire, etc. On parle aussi de lookisme, qui dérive du terme utilisé en anglais.

On a tendance à attribuer aux individus avec un physique jugé harmonieux des qualités comme le talent, la bonté, l’honnêteté et l’intelligence. On les considère plus fiables, moins agressifs et plus compétents. De fait, on juge plus positivement la personnalité des gens si on les trouve beaux, mais en plus, on va être plus attentionné·e et bienveillant·e envers eux.

En somme, être beau, ça donne pas mal d’avantages sociaux, dans le domaine professionnel – en facilitant l’accès à l’emploi par exemple – et même dans le domaine juridique. Il se trouve que si on est dans les standards de beauté, on a en moyenne moins de chances d’être condamné·e pour un même délit, et la condamnation sera moins sévère.
Ça peut s’expliquer par un biais cognitif : l’effet de halo. Les premières informations qu’on a sur une personne vont impacter les suivantes. La première impression influe sur les autres.

Quand on ne correspond pas aux standards de beauté, ça peut être une difficulté supplémentaire, par exemple dans les relations sociales, notamment les relations amoureuses. Ça peut exposer au body shaming, qui désigne les moqueries et humiliations qui peuvent être faites sur l’apparence et la morphologie.

Donc les personnes sont effectivement discriminées selon leur apparence physique, c’est dommage, mais bon qu’est-ce qu’on peut y faire ? Tout ça c’est biologique, on peut pas y faire grand-chose…
Bon c’est peut être un peu vrai, mais c’est aussi très faux, parce que le contexte social a en fait pas mal d’impact dans l’importance qu’on accorde à l’apparence. On vit dans une société qui est très aphrodiste, qui valorise la beauté et encourage à se plier à des standards esthétiques, à des modes vestimentaires, et à dénigrer celles et ceux – surtout celles – qui ne le font pas.

I – L’APHRODISME : UNE CONSTRUCTION SOCIALE

Dans la dernière vidéo sur le genre, on a vu qu’il y avait des attentes sociales en fonction du genre. Les normes de beauté touchent tout le monde, mais pas de la même manière ni avec la même ampleur.

Dans les normes de genre concernant les femmes, la beauté occupe une très grande place. Etre belle, pour une femme, c’est énormément mis en avant, et, socialement, ne pas être belle est beaucoup plus difficile que pour un homme.
Les femmes sont davantage discriminées là-dessus, et vont elles-mêmes y accorder beaucoup d’importance. Elles seront impactées par leur propre vision d’elle-même, en se comparant aux autres, en se dévalorisant, et en étant déçues de ne pas être aussi belles qu’elles le devraient, etc.

Sans en être toujours conscient·e, on accorde généralement une grande place à l’apparence physique, la nôtre et celle des autres. Et cette place que l’on donne à l’apparence va se faire d’autant plus chez les femmes. Dès l’enfance, on va par exemple davantage valoriser les filles en leur disant qu’elles sont belles, en commentant leur tenue vestimentaire ou leur coiffure.

Ça amène alors à grandir avec l’idée que l’apparence et la beauté sont très importantes, et donc à être très préoccupée par ça, et même à y accorder beaucoup de temps et d’énergie, au détriment d’autres activités, pour pouvoir se « faire belle » et correspondre aux standards de beauté.

Et je précise que je ne critique pas les personnes qui se conforment aux normes de beauté et aux pressions sociales, je critique les normes en elles-mêmes.
L’épilation est un bon exemple de ça : ça prend du temps, ça peut coûter cher, voire très cher, tout ça pour un truc qui fait hyper mal…  Et je ne crois pas que les femmes qui s’arrachent les poils le fassent par plaisir. Mais bon c’est normal puisqu’il faut « souffrir pour être belle »

II – GROSSOPHOBIE ET IDÉAL DE MINCEUR

Et bien sûr, une bonne partie des injonctions relatives à l’apparence concernent la silhouette et le poids. Les personnes en surpoids vivent quotidiennement des remarques, des stigmatisations, des humiliations, voire des insultes. De là vient le terme de grossophobie, ou fat shaming qui désigne toutes les discriminations que subissent ces personnes. Ces discriminations sont parfois masquées par l’idée que ce serait pour leur santé, alors même que c’est sur l’apparence que porte la critique.
Donc le poids c’est une bonne partie de l’injonction sociale, on retrouve ça chez les hommes, avec certains qui veulent être plus minces ou alors qui complexent de ne pas être assez musclés; mais c’est surtout chez les femmes qu’on retrouve cette insatisfaction, avec très souvent un désir d’être plus mince.

Là encore ça s’explique par le contexte social, on fait davantage de remarques sur le poids concernant les femmes comme « faire attention à sa ligne » ou « avoir un ventre plat pour l’été ».

Dans les normes actuelles, l’idéal de minceur renvoie à un idéal de beauté: le fait de maigrir est valorisé, il signifie être plus belle et renvoie à une idée de réussite.
Toutes ces injonctions que les gens intériorisent ont des conséquences sur la perception de soi en créant une insatisfaction de l’image corporelle. En même temps quand on nous conditionne à viser des modèles impossibles à atteindre, c’est pas évident d’être satisfait·e de son apparence.

Comme l’indique la théorie de la comparaison sociale (Festinger, 1954), on s’évalue et on s’estime par rapport aux autres. Au quotidien, on effectue des comparaisons automatiques qui sont souvent inconscientes. Et vu que le contexte social met beaucoup en avant l’importance de l’apparence, ça nous amène à nous comparer sur ce critère.

Comme les représentations de la beauté et de la minceur qui sont véhiculées sont inaccessibles, ça va nécessairement entraîner de l’insatisfaction corporelle puisqu’on va se comparer à un idéal qui ne peut pas être atteint. Les médias, le cinéma, la publicité, les réseaux sociaux ont une grande influence sur ces représentations en exposant à une image corporelle stéréotypée.

Par exemple, Instagram nous expose à beaucoup de photos véhiculant une image idéalisée du corps féminin, qui peut aboutir à développer une vision négative de soi et de la dévalorisation. On observe d’ailleurs que les femmes ont tendance à se trouver plus grosses qu’elles ne le sont.

De la même manière, vous avez certainement pu entendre des femmes disant ne pas se trouver belles, alors même qu’elles sont considérées belles par leur entourage, un exemple de dévalorisation de leur apparence.

Et quand une personne se dévalorise sur son apparence en disant « je suis moche, etc. », bien souvent on va vouloir la consoler en lui disant « mais non t’inquiète pas, t’es très belle », et ça part d’une bonne intention, mais les conséquences sont que ça renforce l’idée que c’est important d’être belle. Au final ça veut dire « t’inquiète pas, t’es belle… mais heureusement, parce que si tu l’étais pas, là ça serait problématique… ».

Et quand on a un contexte social rempli d’injonctions sur le physique, voire même qu’on subit du harcèlement à cause de ça, ça peut nous amener à avoir une perception altérée de notre apparence physique. C’est alors un facteur de risque pour le trouble qu’on appelle la dysmorphophobie, où on devient obnubilé·e par notre apparence physique et particulièrement nos défauts. On ne va plus se percevoir tel·le que l’on est réellement, mais on va avoir une image négative de notre physique. Et sans surprise, ça concerne plus de femmes que d’hommes.

Illustration de la dysmorphophobie

Il faut donc remettre en question l’importance qu’on accorde à l’apparence et cesser de valoriser sans cesse la beauté; et surtout uniquement la beauté. Parce que bien souvent c’est ça qui se passe, les femmes sont complimentées sur leur apparence mais ne sont pas assez – voire pas du tout – valorisées sur toutes les autres qualités qu’elles peuvent avoir au-delà du physique, comme la personnalité, l’humour, l’honnêteté, les compétences, etc.

On peut également ajouter que l’aphrodisme va de pair avec d’autres discriminations: bon, le sexisme évidemment; comme on l’a vu, les injonctions sur l’apparence sont différentes et n’ont pas la même ampleur en fonction du genre. Mais l’aphrodisme est aussi lié au racisme, et au validisme – la discrimination des personnes en situation de handicap.
Dans les standards de beauté qui sont mis en avant, on a généralement une femme grande, fine, blanche et valide. Et pas une personne noire et handicapée. Certaines maladies ou handicaps visibles ont des conséquences sur l’apparence, ce qui rend ces personnes plus vulnérables au body shaming.
Et pour ce qui est du racisme, nos sociétés occidentales ont des critères stricts correspondant à l’idéal de la femme blanche, excluant les autres ethnies. Pour coller aux standards de beauté occidentaux actuels, les personnes racisées doivent alors se conformer pour se rapprocher de cet idéal, en se lissant les cheveux par exemple, ou même en utilisant des produits de blanchiment de la peau.
Et l’aphrodisme a aussi un fort lien avec l’âgisme, donc la discrimination selon l’âge. Là où les hommes sont toujours mis en avant en vieillissant, les femmes sont invisibilisées et dévalorisées, et il devient essentiel de garder sa jeunesse en se colorant les cheveux, en utilisant des crèmes anti-rides, etc.

III – OBJECTIFICATION DU CORPS :

Comme on l’a vu, on est exposé·e à des contenus qui véhiculent une image corporelle féminine stéréotypée. De plus, l’image des femmes est souvent hypersexualisée, c’est-à-dire qu’on donne un caractère sexuel même à ce qui n’a à la base rien de sexuel. On l’observe par exemple dans les clips ou les publicités où on voit des gros plans sur les jambes, les fesses et les seins. Ça renforce l’idée que les femmes sont davantage des objets que des êtres à part entière.
On parle de male gaze / regard masculin pour désigner cette culture où, par défaut, tout est vu au travers du regard masculin hétéro. C’est un terme qui vient du cinéma où le cadrage sur le corps des femmes et leurs attitudes correspondent à ce qui est attendu des hommes dans la société actuelle. Et les femmes grandissant dans cette culture-là vont elles-même intérioriser ce regard masculin et agir au quotidien avec l’idée qu’elles sont constamment regardées. Ce qui ramène à l’importance d’être toujours bien présentable.

Ces images réduisent très souvent les femmes à leur corps. Lorsque le corps d’une femme est séparé de sa personnalité et réduit à une fonction sexuelle ou contemplative, on parle d’objectification. Quand les femmes sont objectifiées, elles deviennent des corps dont la fonction est d’être à disposition du plaisir des hommes, en somme, des produits à regarder et à consommer.
De fait, les hommes comme les femmes ont une vision idéalisée du corps féminin. Ainsi, les hommes portent un regard objectifiant vis-à-vis des femmes et les femmes s’objectifient elles-mêmes.
Elles vont alors intégrer ce schéma d’objectification avec l’idée qu’elles seront constamment regardées et évaluées, notamment par des hommes. Ainsi, les femmes intériorisent dès l’enfance la notion de regard masculin et grandissent avec l’idée qu’elles seront en grande partie jugées sur leur apparence.

En conséquence, certaines femmes peuvent développer des préoccupations concernant leur image corporelle vis-à-vis du regard des autres, ce qui peut amener à une recherche active de la minceur et de contrôle du corps. Ces préoccupations peuvent conduire à une diminution de l’estime de soi et de la confiance en soi et être à l’origine d’un sentiment de honte et d’insatisfaction corporelle. Elles favorisent ainsi le développement de troubles psychologiques tels que la dépression, les troubles anxieux ou encore les troubles des conduites alimentaires.

IV – CONSÉQUENCES : LES TROUBLES DES CONDUITES ALIMENTAIRES (TCA) :

– “Est-ce que tu peux nous expliquer  ce qu’est un Trouble des Conduites Alimentaires ? Et combien de personnes sont concernées ?”

Le terme de Troubles des Conduites Alimentaires ou (TCA) désigne plusieurs troubles impliquant des préoccupations pathologiques concernant le poids et des perturbations persistantes de l’alimentation.

Les plus répandus sont l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimique.

  • L’anorexie :

L’anorexie mentale se caractérise par une restriction des apports énergétiques et une perte de poids importante amenant à un indice de masse corporelle, ou IMC, inférieur à la norme. On retrouve également une perturbation de l’image corporelle et une peur intense de prendre du poids.
Il y a deux types d’anorexie: L’anorexie restrictive pure, avec des régimes ou du jeûne. Et l’anorexie purgative, qui implique des comportements compensatoires, c’est-à-dire des comportements pour éviter la prise de poids comme l’hyperactivité physique, les vomissements, ou l’usage de médicaments comme des laxatifs.

  • La boulimie :

La boulimie se manifeste par l’ingestion d’une grande quantité de nourriture sur une courte durée avec un sentiment de perte de contrôle (souvent associé à de la culpabilité).
Et là encore, on retrouve des préoccupations excessives pour le poids et la silhouette et une faible estime de soi. Et aussi la présence de comportements compensatoires pour éviter la prise de poids.
On distingue la boulimie de l’anorexie purgative de par l’IMC. Les personnes concernées par la boulimie présentent souvent un IMC dans la norme.

  • Hyperphagie boulimique :

Et enfin, l’hyperphagie boulimique reprend les critères de la boulimie mais sans les comportements compensatoires. Les personnes concernées sont souvent en situation de surpoids voire d’obésité.

En ce qui concerne la prévalence, les TCA sont plus souvent présents chez les femmes que chez les hommes avec 1% de femmes présentant une anorexie contre 0,3% d’hommes. La boulimie touche quant à elle 1,5% de femmes contre 0,5% d’hommes et l’hyperphagie boulimique va toucher 3% de femmes pour 1,5% d’hommes.

Il y a plusieurs facteurs qui prédisposent aux TCA : des facteurs biologiques, familiaux, psychologiques et socio-culturels.

Parmi les facteurs psychologiques, l’insatisfaction corporelle est l’un des facteurs qui prédit le mieux l’apparition de TCA. Il y a aussi la faible estime de soi, des difficultés à réguler ses émotions, le perfectionnisme ou encore la restriction cognitive – qui est l’intention de contrôler ses apports alimentaires pour maigrir ou ne pas grossir.

L’individu est aussi influencé par son entourage et sa famille, notamment au travers des critiques qu’il peut recevoir, mais aussi des modèles auxquels il est exposé.
Parmi les facteurs socioculturels, on peut noter l’influence de la pression sociale, des normes de beauté et de minceur, l’importance donnée à l’apparence dans l’évaluation de soi, la stigmatisation de l’obésité ou encore le perfectionnisme qui est encouragé par l’idéologie compétitive de la société.

– “Et c’est quoi le lien entre les TCA et l’aphrodisme ?”

L’image corporelle et l’estime de soi auraient un effet direct sur la restriction alimentaire et les comportements compensatoires qu’on retrouve dans les TCA.

Dans notre société, il y a un fort accent qui est mis sur la réussite, et celle-ci est définie au travers de plusieurs idéaux et notamment au travers de l’idéal de minceur. L’estime de soi des femmes dépend donc en grande partie de l’atteinte de cet idéal puisqu’il sert de point de comparaison pour s’estimer. Plus le décalage entre cet idéal et l’image qu’on a de soi est important et plus la personne ressentira de l’insatisfaction corporelle, ce qui impactera son estime de soi.  

Le problème est que lorsque l’estime de soi dépend de notre apparence, ça la rend plus instable, puisqu’elle dépend du contexte : par exemple une critique ou un compliment peut l’impacter fortement.
Une estime de soi basée sur la performance signifie que le moindre échec implique toute notre estime personnelle. Par exemple, complimenter une personne qui a maigri renforce le lien entre son  estime de soi et son apparence, ce qui signifie que lorsqu’elle reprendra du poids, son estime de soi va diminuer. De plus, les compliments vont renforcer la restriction cognitive, ce qui peut participer au cercle vicieux de la pathologie. 

Se restreindre implique des mécanismes physiologiques qui vont avoir un impact sur les sensations comme la faim et la satiété et altérer le circuit du plaisir. La restriction va donc participer à dérégler le rapport à l’alimentation et activer des mécanismes de survie. Elle induit notamment un état de stress qui pousse le corps à réagir en générant une envie de manger, ce qui peut amener à des crises de boulimie.

C’est ce que l’on retrouve dans le fonctionnement des régimes avec le fameux effet yoyo où la personne se prive pendant un temps, ce qui engendre de la frustration et amène la personne à compenser par la suite. La restriction a aussi pour effet d’activer un mécanisme biologique de stockage. 

De plus, lorsqu’une personne rentre en restriction, ça va progressivement altérer son circuit de la récompense et amener à la perte du plaisir de manger. En revanche, la personne va retirer un certain plaisir au contrôle et à la maîtrise de soi : la restriction sera vécue comme une réussite et la crise comme un échec.

D’ailleurs, le plaisir de manger participe à la sensation de satiété, son absence va donc perturber ces sensations et peut pousser à l’envie de manger plus. La restriction peut donc être considérée comme un mécanisme sous-jacent à l’origine des compulsions alimentaires que l’on retrouve par exemple dans la boulimie. 

Les TCA sont souvent déclenchés à l’adolescence, qui est une période charnière dans la construction de l’identité. Les modifications qui ont lieu à la puberté ont des conséquences psychologiques sur les adolescent·es. Parmi ces effets, on peut noter la recherche d’un corps idéalisé ou encore le refus du corps qui change.

L’adolescent·e doit alors reconstruire l’image de son corps, le reconnaître, l’accepter et se l’approprier. C’est là qu’entrent en jeu les normes sociales et notamment l’idéal de minceur, qui va servir de point de référence.
Aussi, il est important de noter que c’est dans cette période que le besoin d’affiliation, c’est-à-dire le besoin d’appartenir à un groupe social, est le plus important. Les adolescent·es vont davantage chercher l’approbation de leurs pairs donc la pression à se conformer aux normes sociales sera d’autant plus forte.
Comme on l’a vu, l’idéal de minceur associe la minceur à la beauté et à la réussite. Les jeunes filles sont donc plus susceptibles de développer des problèmes d’image corporelle. Il n’est donc pas surprenant que celles-ci soient les plus touchées par les Troubles des Conduites Alimentaires.

Pour retrouver une alimentation équilibrée, il ne suffit pas de dire à une personne qu’elle devrait faire un effort pour que ça aille mieux. Le sentiment de culpabilité ou la recherche de contrôle que ça peut induire vont être contre productifs. Au contraire, les injonctions et les discrimination impactent l’estime de soi, ce qui va au final augmenter le stress de la personne, l’isoler et l’enfermer dans ses difficultés, plutôt que l’encourager à chercher de l’aide. Ces injonctions peuvent avoir pour effet d’augmenter la restriction cognitive.

Les TCA impliquent des mécanismes physiologiques et psychologiques complexes qui ne sont pas réductibles à la simple volonté de la personne. Le rétablissement passe souvent par une prise en charge pluridisciplinaire (sur les aspects diététiques, nutritionnels, psychologiques et psychiatriques).

Si vous ou une personne de votre entourage êtes concernées par la problématique des TCA, nous vous invitons à contacter votre psychologue, psychiatre et/ou médecin traitant, et à vous référer aux liens
suivants :
Lien vers la Fédération Française d’Anorexie et de Boulimie (FFAB) :
https://www.ffab.fr/
Trouver de l’aide : https://www.ffab.fr/trouver-de-l-aide/pres-de-chez-moi-carte
Le site donne accès à un annuaire qui référence les structures et professionnel·les qui prennent en charge les TCA.


CONCLUSION :

Dans cette vidéo, on a vu que les injonctions sur l’apparence ont beaucoup de poids dans nos sociétés, avec par exemple l’impératif de correspondre aux standards de beauté, les comparaisons sociales, etc. Ces comparaisons constantes et les exigences qui les accompagnent renforcent le sentiment d’insatisfaction corporelle et nuisent à l’estime de soi. Il est alors nécessaire de détacher notre estime personnelle des normes de beauté qui nous sont imposées. À ce sujet, je vous invite à écouter la conférence Ted vraiment top de Charlie Danger qui s’appelle « pourquoi vous ne serez jamais la plus belle ».

On a aussi vu comment l’aphrodisme s’entremêlait avec d’autres discriminations : sexisme, racisme, validisme et âgisme. Et on aurait même pu ajouter le spécisme, puisqu’on aura tendance à davantage se sentir concerné·e par le sort des animaux mignons que par ceux qu’on trouve laids.

Et enfin, on a vu comment l’exposition aux contenus valorisant l’apparence pouvait avoir des conséquences négatives en créant du mal-être, de la culpabilité, de la dévalorisation, et pouvant aller jusqu’à des pathologies telles que la dysmorphophobie ou les TCA.
Et on pourrait également ajouter que plus on est exposé·e à ces images, plus on a une forte approbation des stéréotypes qui dépeignent les femmes comme des objets sexuels, et placent l’apparence et l’attrait physique au centre des valeurs des femmes.

Pour lutter contre tout ça, le mouvement bodypositive a émergé. Il prône l’acceptation de soi, et le fait que tous les types de corps peuvent être beaux, au-delà des normes; qu’importe la taille ou la forme. Il véhicule plutôt l’idée d’une beauté pouvant exister même loin des standards et met en avant les corps qui ne sont habituellement pas montrés.
Grâce à l’idée d’accepter notre corps et de valoriser notre estime personnelle, ce mouvement montre des effets bénéfiques en aidant à avoir une meilleure image de son corps, en comparaison avec les diktats classiques de la beauté.
Pour autant, si le body positive semble s’éloigner des normes sociales actuelles, il maintient l’idée que la beauté est importante. On reste sur une idée d’exposition du corps.
En tout cas, bodypositive ou pas, on y gagne à s’émanciper des normes sociales actuelles. En accordant moins d’importance à l’apparence, en arrêtant de complimenter autant sur la beauté des personnes, en valorisant d’autres qualités et en cessant les injonctions : à s’épiler, à se maquiller, à s’habiller de telle ou telle manière, etc.,  on évitera pas mal de souffrances.
En somme, si on veut le bien des autres, faisons en sorte d’évoluer vers une culture ou l’apparence ne prend plus une place aussi importante.

——————————————————————————————————————–

Sources et lien :

Script de la précédente vidéo sur le genre :
https://mangayoh.fr/scripts-videos/en-finir-avec-la-theorie-du-genre/

Publications scientifiques :

L’influence socio-culturelle et notamment l’influence médiatique commes facteur causal (parmi d’autres) des idéaux socio-culturels de beauté et d’insatisfaction corporelle:
-Thompson, J. K., Heinberg, L. J., Altabe, M., & Tantleff-Dunn, S. (1999). Exacting beauty: Theory, assessment, and treatment of body image disturbance. Washington: American Psychological Association. https://doi.org/10.1037/10312-000

L’influence socio-culturelle comme source véhiculant des standards de beauté et attentes concernant l’apparence souvent restrictifs et inatteignables pour la majorité des individus :
-Schooler, D., & Ward, L. M. (2006). Average Joes: Men’s Relationships With Media, Real Bodies, and Sexuality. Psychology of Men & Masculinity, 7(1), 27‑41. https://doi.org/10.1037/1524-9220.7.1.27
-Pope, H. G., Olivardia, R., Gruber, A., & Borowiecki, J. (1999). Evolving ideals of male body image as seen through action toys. International Journal of Eating Disorders, 26(1), 65‑72. https://doi.org/10.1002

Les filles et jeunes femmes qui consomment ou consomment du contenu médiatique traditionnel exposant aux images sexistes présentent une plus forte approbation des stéréotypes sexuels qui dépeignent les femmes comme des objets sexuels, et placent aussi l’apparence et l’attrait physique au centre des valeurs des femmes :
-Ward, L. M., & Rivadeneyra, R. (1999). Contributions of entertainment television to adolescents’ sexual attitudes and expectations: The role of viewing amount versus viewer involvement. Journal of Sex Research, 36(3), 237‑249. https://doi.org/10.1080/00224499909551994
-Zurbriggen, E. L., & Morgan, E. M. (2006). Who Wants to Marry a Millionaire? Reality Dating Television Programs, Attitudes Toward Sex, and Sexual Behaviors. Sex Roles, 54(1), 1‑17. https://doi.org/10.1007/s11199-005-8865-2.
Sur l’hypersexualisation:
-Zurbriggen, E. L., Collins, R. L., Lamb, S., Roberts, T.-A., Tolman, D. L., Ward, L. M., & Blake, J. (s. d.). Sexualization of Girls 2010, 72.

L’insatisfaction corporelle comme facteur de risque potentiel de la dépression et d’une faible estime de soi. L’écart entre l’idéal corporel et la perception du corps jouerait un rôle dans la diminution de l’estime de soi :
-Neumark-Sztainer, D., Paxton, S. J., Hannan, P. J., Haines, J., & Story, M. (2006). Does Body Satisfaction Matter? Five-year Longitudinal Associations between Body Satisfaction and Health Behaviors in Adolescent Females and Males. Journal of Adolescent Health, 39(2), 244‑251. https://doi.org/10.1016/j.jadohealth.2005.12.001

Lien entre une faible estime de soi et la présence de plusieurs troubles psychiatriques dont notamment les TCA, les troubles dépressif majeur, le trouble dysthymique, les troubles anxieux et les troubles de la personnalité :
-Leary, M. R., & MacDonald, G. (2003). Individual differences in self-esteem : A review and theoretical integration. In Handbook of self and identity (p. 401‑418). The Guilford Press.
-Mora, F., Fernandez Rojo, S., Banzo, C., & Quintero, J. (2017). The impact of self-esteem on eating disorders. European Psychiatry, 41(S1), S558‑S558. https://doi.org/10.1016/j.eurpsy.2017.01.802

Lien entre la faible estime de soi et les TCA :
-Bégin, C., Boucher, K., St-Laurent, A., Heppell, J.-L. & Ratté, C. (2016). L’estime de soi explicite et implicite chez des femmes souffrant de troubles des conduites alimentaires. Revue québécoise de psychologie, 37(1), 133–152. https://doi.org/10.7202/1040107ar
Lecture en ligne ici : https://www.erudit.org/fr/revues/rqpsy/2016-v37-n1-rqpsy03085/1040107ar.pdf

Facteurs biologiques, familiaux, psychologiques et socio-culturels prédisposant aux TCA :
-Lamas, C. (2012). Les troubles des conduites alimentaires. Elsevier Masson.

L’image corporelle et l’estime de soi auraient un effet direct sur la restriction alimentaire et les comportements compensatoires qu’on retrouve dans les TCA :
-Brechan, I., & Kvalem, I. L. (2015). Relationship between body dissatisfaction and disordered eating : Mediating role of self-esteem and depression. Eating Behaviors, 17, 49‑58. https://doi.org/10.1016/j.eatbeh.2014.12.008

Sur les effets de l’insatisfaction corporelle et l’amélioration de cette satisfaction :
-Poretti, A. et Van Beek, S. (2017). Image corporelle positive : les interventions et leurs effets chez les adolescent-e-s :
https://doc.rero.ch/record/306779/files/tb_diet_2017_5.pdf

Sur l’intégration des normes de beauté chez les adolescentes et l’utilisation des réseaux sociaux comme instagram :
-Di Venti, I. (2019). Les adolescentes et les diktats de la beauté sur Instagram. Quelle influence sur leur image corporelle et leur utilisation du réseau social ? Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication, Université catholique de Louvain.
https://dial.uclouvain.be/memoire/ucl/fr/object/thesis%3A21357
Sur le body positive, article cité à la page 21 du mémoire ci-dessus :
-Cohen, R., Irwin, L., Newton-John, T., & Slater, A. (2019). : A content analysis of body positive accounts on Instagram. Body Image, 29, pp. 47–57.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30831334/

Influence de la beauté sur les décisions judiciaires :
http://psychologie.psyblogs.net/2012/02/les-decicions-de-justice-influencees.html
Dans le domaine professionnel :
-Garner-Moyer, H. (2008). Le poids de l’apparence physique dans la décision d’embauche. Le Journal des psychologues : https://www.cairn.info/revue-le-journal-des-psychologues-2008-4-page-53.htm(Page
Sur les attributions :
-Todorov, A., Olivola, C. Y., Dotsch, R., & Mende-Siedlecki, P. (2015). Social Attributions from Faces: Determinants, Consequences, Accuracy, and Functional Significance : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25196277/

Sites internet :

Site du gouvernement du Québec sur les questions d’image corporelle, de genre, stéréotypes, hypersexualisation, etc.
https://www.quebec.ca/famille-et-soutien-aux-personnes/developpement-des-enfants/consequences-stereotypes-developpement/image-corporelle
https://www.quebec.ca/famille-et-soutien-aux-personnes/developpement-des-enfants/consequences-stereotypes-developpement/effets-hypersexualisation

Dysmorphophobie :
https://www.msdmanuals.com/fr/professional/troubles-psychiatriques/troubles-obsessionnels-compulsifs-et-troubles-similaires/dysmorphophobie

Université du Québec | Estime de soi et image corporelle: Comprendre pour mieux intervenir:
https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publications-adm/SCF/Estime_de_soi_et_image_corporelle.pdf?1592331365

Page wiki de la théorie de la comparaison sociale de Festinger :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_de_la_comparaison_sociale


Vidéos youtube/peertube et podcast :

Effet de halo | ScienceEtonnante :
https://www.youtube.com/watch?v=xJO5GstqTSY
https://scienceetonnante.com/2016/05/20/leffet-de-halo-cretin-de-cerveau-1/

Le Male Gaze sur cafaitgenre :
https://cafaitgenre.org/2013/07/15/le-male-gaze-regard-masculin/

Male Gaze, ce que voient les hommes | Podcast des couilles sur la table  :
https://www.binge.audio/podcast/les-couilles-sur-la-table/male-gaze-ce-que-voient-les-hommes
https://www.youtube.com/watch?v=0oMsFlQk_m4

Plusieurs super vidéos de PsykoCouac :
Stéréotypes et beauté :
https://www.youtube.com/watch?v=yFLTa7WRVcI
Pourquoi il est difficile de maigrir :
https://www.youtube.com/watch?v=ZP915AYMJn4
Le sentiment de privation dans les régimes nuit à la perte de poids :
https://www.youtube.com/watch?v=Qfdb9Qh_KSM
L’anorexie mentale :
https://www.youtube.com/watch?v=K5pumZyl7Gc

Culpabilisation et obésité | Sohan Tricoire :
https://www.youtube.com/watch?v=o6hZ5Erwl_k&pp=sAQA
https://tube.kher.nl/w/cYspgWHfdMJSzKSjJxY4oK

Faut-il être mignon pour survivre | Le Vortex :
https://www.youtube.com/watch?v=nUJqRXGwhHI

Pourquoi vous ne serez jamais belle | Ted talks de Charlie Danger :
https://www.youtube.com/watch?v=UQLWAPePp8o

Écriture : Yohann Hoarau et Cécilia
Montage : Léo Génin